TechDécouverte propose des mesures pour renforcer le plan de relance européen
Le 2 octobre 2020, l’organisation non gouvernementale TechDécouverte a diffusé une note (rédigée en anglais) visant à améliorer la proposition de la Facilité pour la Reprise et la Résilience (FRR), élément central du plan de relance Next Generation EU (NGEU) de l’Union européenne, d’un montant de 750 milliards d’euros.
N.B. : Ce texte est la traduction du résumé exécutif de la note initialement parue en anglais sur le site principal de TechDécouverte.
Synthèse des principes recommandés pour une relance durable
1 – La résilience comme solution aux perturbations futures
La pandémie de Covid-19 a mis en évidence la fragilité de notre économie et notre vulnérabilité face à ses crises. Mais les changements climatiques anthropiques pourraient entraîner bien d’autres perturbations. Selon le GIEC, sans changement de direction, le réchauffement planétaire pourrait atteindre entre 3,7 et 4,8°c d’ici la fin du siècle, entraînant des bouleversements massifs. Nous avons compris, notamment grâce à la crise du Covid-19, que l’approche économique « pré-Covid » est incompatible avec la construction d’un avenir viable pour l’humanité. Nous devons changer de cap et nous orienter vers une économie durable. La crise du Covid-19 représente également une opportunité : celle d’une relance dans cette nouvelle direction. Ce rapport vise à identifier les leviers nécessaires pour y parvenir.
2 – La FRR (Facilité pour la Reprise et la Résilience) : plus axée sur la reprise que sur la résilience
Nous examinons ici le dispositif phare de l’UE, le plan de relance « Next Generation EU » (NGEU) de 750 milliards d’euros, et plus particulièrement son noyau, la « Facilité » pour la Reprise et la Résilience. Malheureusement, dans sa forme actuelle, ce plan privilégie la croissance à court terme plutôt que la résilience et la durabilité. Cependant, avec quelques modifications, le NGEU et la FRR pourraient devenir un puissant outil de solidarité paneuropéenne, orientant l’Europe vers une direction soutenable.
3 – Soutenir les activités durables, y compris celles en transition et celles qui facilitent la transition
Pour une relance résiliente, la FRR devrait être intégralement consacrée au soutien des activités durables, dont la définition doit être claire. Il est surprenant que la proposition de règlement établissant la FRR ne fasse pas usage de la Taxonomie des activités durables adoptée par l’Union européenne. La Taxonomie des activités durables, en tenant compte des secteurs d’activité en transition, pourrait constituer un cadre efficace et pragmatique.
4 – Ne pas soutenir (du tout) les activités non durables
En contrepartie du soutien offert aux activités durables, il conviendrait de ne pas soutenir du tout les activités non durables. Le soutien à ces activités minerait les efforts de soutien aux activités durables et gaspillerait l’effet incitatif des prêts et des subventions. Ces secteurs d’activité sont sans avenir : soit nous y mettons un terme, soit les bouleversements qu’ils provoqueront le feront pour nous.
5 – Soutenir les personnes, quel qu’en soit le coût
Une transition à l’échelle requise pour éviter les pires conséquences du changement climatique ne se fera pas sans difficultés et implique des changements majeurs. La FRR, plutôt que de soutenir les entreprises impliquées dans des activités non durables, devrait soutenir les personnes employées par ces entreprises. Les fonds devraient être consacrés à leur reconversion, mais aussi au soutien des personnes qui ne pourront pas se reconvertir. Ce soutien devrait prendre la forme d’un revenu garanti fixé à un niveau suffisant pour préserver la dignité humaine.
6 – Préciser les définitions de « vert » et du principe de « non-nuisance »
Le NGEU et la FRR visent à être au moins 30 % « verts », et l’ensemble du dispositif doit respecter le principe de « non-nuisance ». Le Règlement établissant une Taxonomie des activités durables devrait être utilisé pour définir précisément ces termes. En premier lieu, « durable » devrait remplacer « vert ». Ensuite, la logique de « non-nuisance » développée dans le Règlement devrait être mise en application. Une telle approche encouragerait de nombreuses activités à engager leur transition vers la durabilité.
7 – Évaluer la durabilité des plans de reprise et de résilience des États Membres
Bien que le Conseil européen ait déclaré que « toutes les dépenses de l’UE devraient être compatibles avec les objectifs des Accords de Paris », cela n’a pas été repris par la Commission européenne comme critère d’évaluation des plans de reprise et de résilience. Ce devrait pourtant être le cas. En particulier, le budget entier du pays bénéficiaire devrait être évalué et non uniquement les projets additionnels liés à la FRR. Les budgets devraient être évalués dans leur ensemble selon le principe de « non-nuisance », et notamment, les subventions aux combustibles fossiles doivent être considérées comme incompatibles avec une attribution de fonds de la FRR. Une cohérence globale doit prévaloir. L’évaluation de l’ensemble des budgets nationaux permettrait à l’UE d’optimiser l’utilisation des fonds de la FRR et de catalyser le changement.
8 – Assurer la cohérence entre les ressources allouées et leur utilisation
Cette nouvelle capacité de la Commission européenne à emprunter jusqu’à 750 milliards d’euros pour le NGEU est un pas en avant pour la solidarité paneuropéenne, mais les modalités de cet emprunt devraient être en adéquation avec les objectifs du mécanisme. L’objectif de la Commission, à savoir un emprunt composé à 30 % de Green Bonds, est insuffisant. Il n’y a aucune raison de ne pas lever 100% de ces fonds sous forme de Green Bonds. La transparence des structures de financement est essentielle pour que l’ensemble du programme Next Generation EU ait l’impact voulu et il est indispensable que la transparence des financements levés vis à vis du Règlement Taxonomie soit totale.
9 – Réformer les règles de gouvernance économique de l’UE pour plus de durabilité
L’UE a besoin de repenser de toute urgence sa gouvernance économique, notamment en ce qui concerne les règles budgétaires. Les règles budgétaires de l’UE manquent de fondement économique, et elles ont contribué à imposer une austérité néfaste après la crise financière. Si elles ont été suspendues à juste titre en raison de la crise du Covid-19, elles devraient être définitivement abandonnées. La gouvernance économique de l’UE devrait systématiquement prendre en compte les critères de durabilité et d’inclusion sociale dans le cadre de la « transition verte et juste » et ceux-ci devraient être inclus dans l’évaluation des plans de reprise et de résilience.
10 – L’argent peut pousser sur les arbres (pour les entités souveraines)
L’argument en faveur de la suppression des contraintes budgétaires de l’UE est renforcé par le contexte économique et financier qui voit se combiner des taux d’intérêt nuls ou négatifs, une inflation très basse et un renforcement de la pression déflationniste par la récession actuelle. Compte tenu de l’urgence de transformer nos économies, la période se prête particulièrement à l’emprunt pour investir dans une transition juste et verte vers un avenir durable.
Consultez également notre dernier rapport (en anglais) : « Fiscal Mythology Unmasked. Debunking eight tales about European public debt and fiscal rules ».
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