Réforme des règles budgétaires de l’UE expliquée par le youtuber Heu?reka

par | Avr 24, 2024 | Finance | 0 commentaires

Comprendre la réforme des règles budgétaires de l’UE avec le youtuber Heu?reka

Les principes de contrôle budgétaire européen, mis en suspens pendant la crise sanitaire, vont être ‘modernisés’ et relancés. TechDécouverte et Greentervention ont collaboré avec Gilles Mitteau (chaîne économique Heu?reka) pour vous aider à comprendre les implications de cette modification

La vidéo explicative

Malheureusement, nous ne pouvons pas inclure la vidéo ici. Cependant, vous pouvez la retrouver sur YouTube en recherchant « Les traités européens sont-ils réellement austéritaires ? ».

En quoi cela est-il crucial ?

Les normes budgétaires constituent l’un des fondements du cadre de gouvernance économique de l’UE. Selon ce cadre, les États membres doivent garder leurs déficits budgétaires en dessous de 3% du produit intérieur brut (PIB) et leur dette publique en dessous de 60% du PIB.

Des normes inadéquates dans le contexte actuel

Ce cadre extrêmement strict a largement contribué aux politiques d’austérité destructrices mises en œuvre après la crise financière mondiale. La réduction massive des dépenses publiques après la crise de 2008 a en effet entraîné une diminution de la demande globale et une réduction de la production économique.

Plus alarmant encore, dans sa forme actuelle, le cadre budgétaire nous empêche de progresser vers la réalisation de nos objectifs sociaux et environnementaux. L’UE a un besoin urgent d’investissements, non seulement privés, mais aussi publics :

  • Avant même la pandémie, le manque d’investissement de l’UE dans les infrastructures sociales était estimé à au moins 142 milliards d’euros par an, et ne cessait d’augmenter.
  • Pour limiter les effets les plus dommageables de l’urgence climatique, la Commission européenne estime que le « déficit d’investissement vert » s’élève à 520 milliards d’euros par an.

Phillip Heimberger, économiste au Vienna Institute for International Economic Studies, affirme :

« Nous devons profondément modifier les règles budgétaires de l’UE pour donner à ceux qui sont en charge des politiques budgétaires, et qui ont été élus démocratiquement, toutes les chances de relever les défis économiques, sociaux et climatiques auxquels nous sommes confrontés. Il faudra mobiliser beaucoup plus d’investissements publics au cours des prochaines décennies que ce qui a été fait jusqu’à présent, et nous ne pourrons y parvenir en nous limitant au statu quo des règles actuelles ».

Les règles budgétaires doivent être modifiées en affirmant clairement que la dette publique n’est pas nécessairement mauvaise pour les générations futures. Au contraire, elle peut être essentielle pour financer des investissements publics de grande envergure, au plus grand bénéfice de ces générations futures.

L’opportunité de rectifier les règles budgétaires de l’UE

Ce mois-ci, les ministres des Finances de l’UE se réuniront à Bruxelles pour tenter de trouver un consensus sur une réforme des règles budgétaires européennes. Le sujet est politiquement délicat, tant les enjeux liés à la dette publique sont influencés par l’histoire économique de chaque pays membre.

La Commission avait choisi de suspendre l’application du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) dès avril 2020, au plus fort de la pandémie de Covid-19. Il devrait être réactivé avant la fin de l’année.

Le PSC impose comme principales règles aux Etats membres de viser une dette publique d’un maximum de 60 % du PIB et un déficit de maximum 3 % du PIB. Si un pays dépasse l’un de ces seuils, alors des mesures sont prises en concertation avec la Commission européenne pour rééquilibrer les dépenses publiques.

Depuis la proposition de la Commission de novembre 2022, des négociations ont été lancées pour revoir ces règles, largement perçues comme inadaptées et empêchant les Etats membres de s’engager sur la voie d’une croissance durable.

Vers des trajectoires de réduction de la dette adaptées à chaque pays ?

Tous les Etats membres semblent déjà d’accord pour changer d’approche dans les efforts de réduction de la dette publique. Contrairement à l’approche uniforme adoptée en 2011, il faudrait plutôt s’orienter vers des trajectoires de dette spécifiques à chaque pays, en fonction de leurs besoins et réalités économiques.

La mise en œuvre pratique de cette approche, en revanche, est une autre affaire et les pays membres peinent à trouver un accord.

La meilleure option – soutenue par des économistes de renom, dont Olivier Blanchard, ancien économiste en chef du Fonds monétaire international – consiste à élaborer ces trajectoires spécifiques sur la base d’analyses de soutenabilité de la dette propres à chaque pays.

Une analyse de soutenabilité de la dette est comme un test de résistance, ou « stress test », pour les finances publiques. Elle envisage des scénarios économiques futurs et simule l’impact de chocs économiques de nature différente sur les principaux facteurs de la dynamique de la dette.

Cela permet de mieux comprendre les options dont dispose un pays pour renforcer son économie et ses finances publiques, qui ne passent pas uniquement par une réduction brutale des dépenses publiques. D’autres solutions existent, comme des investissements publics dans des projets d’avenir.

Quel partage du coût de la transition entre générations ?

La dette publique est encore trop souvent perçue comme un fardeau pour les générations futures, un poids financier intrinsèquement mauvais.

Cependant, ce n’est pas nécessairement le cas.

Les investissements dans certaines infrastructures publiques stratégiques et dans la recherche et le développement (R&D) ont un effet multiplicateur important, stimulant la croissance économique et l’emploi. D’autres dépenses publiques, telles que celles liées par exemple à la politique industrielle verte ou à l’efficacité énergétique, peuvent également nous aider à atteindre nos objectifs de durabilité.

Compte tenu de leur impact positif sur l’économie, sur la réduction des risques environnementaux et, en fin de compte, sur les finances publiques, ces dépenses publiques ne sont pas un fardeau mais une opportunité pour les générations futures. Elles devraient donc être exclues du calcul des plafonds de déficit et de dépenses.

Le financement de ces projets par la dette est un moyen légitime de répartir le coût entre ceux qui supervisent leur création, et ceux qui en bénéficieront plus tard.

La crainte d’une réaction des marchés financiers : une peur irrationnelle ?

L’argument des pays membres les plus réticents face à une réforme est simple : ils redoutent une réaction négative des marchés financiers face à des montants de dette publique jugés élevés dans de nombreux pays européens.

Mais en réalité, les marchés financiers prêtent peu d’attention aux seuils budgétaires arbitraires tels que ceux du PSC. Comme l’illustre le graphique ci-dessous, les agences de notation de crédit comme Moody’s se soucient moins du ratio dette/PIB d’un pays que de la taille, de la diversité et de la puissance de son économie.

Par exemple, les États-Unis et la France, qui avaient tous deux des taux d’endettement dépassant les 120% de leur PIB en 2020, affichaient respectivement la meilleure et la troisième meilleure cote de crédit possible (AAA et Aa2). En revanche, l’Ukraine, bien qu’ayant un taux d’endettement inférieur à 60 % en 2020, affichait l’une des cotes de crédit les plus basses (B3).

L’Europe à un carrefour

Le ratio dette/PIB n’est pas un bon indicateur pour évaluer la viabilité de la dette d’un pays et les marchés financiers le savent – il s’agit tout au plus d’une cible politique facilement compréhensible, mais trompeuse. D’autres indicateurs sont nécessaires, et c’est pourquoi l’UE doit s’orienter vers des trajectoires d’endettement spécifiques à chaque pays, fondées sur des analyses précises de soutenabilité de la dette.

Les nouvelles règles budgétaires européennes devront également encourager ces catégories de dépenses publiques bénéfiques pour l’économie et les finances publiques.

Si nos ministres des Finances ne se montrent pas à la hauteur de la situation en mars, ce sont les futures générations européennes qui en pâtiront.

Ludovic Suttor-Sorel

Lectures complémentaires

  • 7 propositions de réformes pour la gouvernance économique européenne (en anglais)
  • La mythologie budgétaire démasquée — Démystifier huit fausses idées sur la dette publique européenne et les règles budgétaires
  • Revoir le webinaire FNH & TechDécouverte : « Réforme du Pacte de stabilité et de croissance »

Voir la vidéo

Nous vous invitons à retrouver la vidéo sur YouTube en recherchant « Les traités européens sont-ils réellement austéritaires ? ».

A découvrir :  Comprendre les enjeux et limites de la directive CSRD en matière de reporting de durabilité
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Mathilde Précault

Auteur

Mathilde Précault est une figure passionnée et reconnue dans le monde de la formation en technologies et compétences numériques pour les entreprises. Dotée d'une expertise approfondie en matière de nouvelles technologies, Mathilde a consacré sa carrière à aider les professionnels à naviguer et à exceller dans le paysage numérique en constante évolution. Sa pédagogie unique, alliant théorie et pratique, permet aux apprenants de tous niveaux d'acquérir des compétences essentielles, de la maîtrise des outils de base à l'exploration des dernières innovations technologiques. En tant qu'autrice pour Techdécouverte.com, Mathilde partage ses connaissances et son enthousiasme pour la technologie, offrant aux lecteurs des perspectives enrichissantes et des conseils pratiques pour rester à la pointe de l'ère numérique

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